par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 2, 2 juin 2005, 04-13509
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Cour de cassation, 2ème chambre civile
2 juin 2005, 04-13.509

Cette décision est visée dans la définition :
Secret / Secret professionnel




AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :

Vu les articles L. 1110-4 du Code de la santé publique et 4 du décret du 6 septembre 1995 portant Code de déontologie médicale, devenu l'article R. 4127-4 du Code de la santé publique ;

Attendu qu'aux termes du premier de ces textes, toute personne prise en charge par un professionnel, un établissement, un réseau de santé ou tout autre organisme participant à la prévention et aux soins a droit au respect de sa vie privée et au secret des informations la concernant ; qu'aux termes du second, le secret professionnel, institué dans l'intérêt des patients, s'impose à tout médecin dans les conditions établies par la loi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. et Mme X... ont obtenu le 17 octobre 1990 de la Banque populaire de Champagne, aux droits de laquelle vient la Banque populaire Lorraine Champagne (la banque), un prêt immobilier et adhéré, pour garantir le remboursement des échéances, au contrat d'assurance de groupe décès, invalidité, incapacité de travail, souscrit par la banque auprès de la société Assurances générales de France (la société) ; que placé en arrêt de travail, en raison d'une pancréatite aiguë, M. X... a sollicité le bénéfice de la garantie ; que la société a opposé, pour refuser sa garantie, que l'éthylisme de l'adhérent à l'origine de son affection était exclu de la garantie ; que M. X... a assigné la société, ainsi que la banque, devant le tribunal de grande instance en exécution du contrat ;

Attendu que pour refuser d'ordonner l'expertise sollicitée par la société, qui faisait valoir qu'elle disposait d'éléments de preuve établissant ses dires mais qu'elle ne pouvait les verser aux débats en raison du secret médical couvrant ces renseignements, sauf à la juridiction saisie à ordonner une mesure d'expertise, et la condamner à prendre en charge les mensualités du prêt immobilier souscrit par M. X... auprès de la Banque populaire de Champagne, l'arrêt énonce qu'il appartient à la société de démontrer que la maladie de M. X... ayant entraîné pour celui-ci une incapacité totale de travail est exclue de sa garantie ; qu'elle ne produit aucune pièce aux débats de nature à apporter le moindre commencement de preuve de ce qu'elle avance ; qu'elle se contente uniquement d'affirmer que la maladie aurait pour cause l'éthylisme de M. X... sans qu'aucune démonstration médicale ne permette de considérer que cette assertion est vraie ou à tout le moins suffisamment vraisemblable pour justifier une mesure d'instruction ; qu'elle soutient qu'elle dispose d'une expertise médicale réalisée par l'un de ses médecins conseils et d'un compte-rendu d'hospitalisation desquels il résulterait que ce qu'elle avance est exact ;

qu'elle refuse toutefois de produire ces documents aux débats en se retranchant derrière le secret médical, mais que celui-ci ne bénéficiant qu'à M. X..., elle ne saurait valablement opposer à ce dernier une protection qui ne peut être invoquée que par lui ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'assureur ne peut produire un document couvert par le secret médical intéressant le litige qu'à la condition que l'assuré ait renoncé au bénéfice de ce secret, et qu'il appartient au juge, en cas de difficulté, d'apprécier, au besoin après une mesure d'instruction, si l'opposition de l'assuré tend à faire respecter un intérêt légitime, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche du moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 9 février 2004, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ;

remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nancy ;

Condamne M. X... et la Banque populaire Lorraine Champagne aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes respectives de la société Assurances générales de France vie et de la Banque populaire Lorraine Champagne ;

Dit que sur les diligences du Procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du deux juin deux mille cinq.



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Cette décision est visée dans la définition :
Secret / Secret professionnel


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 11/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.