par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



EXCEPTION DEFINITION
Dictionnaire juridique

Définition de Exception

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Lorsque, par exemple, au motif qu'il n'a pas reçu l'acompte promis, le vendeur refuse de livrer à l'acheteur la marchandise qu'il lui a vendue, on dit qu'il "excipe" du non-accomplissement d'une des obligations mise à la charge de son co-contractant. "Exciper", "soulever une exception" ou "opposer une exception" sont des expressions équivalentes. L'exception est donc un moyen de défense par lequel une des parties paralyse la prétention de son adversaire. A titre d'exemple citons : Les exceptions d'incompétence, les exceptions de litispendance et de connexité, les exceptions dilatoires et les exceptions de nullité.

Cette paralysie peut être provisoire, comme le fait d'exciper du délai pour faire inventaire ou le fait d'exciper de la nécessité de renvoyer la cause pour permettre à celle des parties qui s'en prévaut, d'introduire une procédure d'appel en garantie. Dans ces hypothèses, l'exception a pour seul effet de suspendre le procès. En revanche, dans certains cas, soit quelle ait pour objet de contester la validité de la procédure soit quelle porte sur le fond du droit, l'exception tend alors à mettre fin au litige. Cependant, si elle est soumise au régime des nullités de procédure en application de l'article 175 du code de procédure civile, la demande de nullité de l'expertise ne constitue pas une exception de procédure au sens de l'article 73 du même code, (2ème Chambre civile 31 janvier 2013, pourvoi n°10-16910, BICC n°782 du 15 mai 2013 et Legifrance).

L'exception porte sur la nullité de la procédure lorsque, par exemple, la citation est périmée. Elle concerne le fond du droit si le défendeur qui a été assigné en paiement, excipe de l'absence de lien de droit avec le demandeur ou oppose le paiement de la dette.

La règle selon laquelle l'exception de nullité peut seulement jouer pour faire échec à la demande d'exécution d'un acte qui n'a pas encore été exécuté, ne s'applique qu'à compter de l'expiration du délai de prescription de l'action. Après cette date, l'exception n'est recevable que si l'acte n'a pas commencé à être exécuté ce qui doit résulter de l'arrêt ou des productions de la partie qui oppose la prescription de l'exception de nullité. (1ère Chambre civile 12 novembre 2015, pourvoi n°14-21725, BICC n°839 du 1er avril 2016 et Legifrance).

Sur l'exception de jeu, la 1ère Chambre civile a jugé que si la loi n'accorde aucune action pour une dette de jeu ou pour le payement d'un pari, cette fin de non-recevoir ne peut en revanche être opposée aux actions en recouvrement exercées par les établissements du pari mutuel urbain (PMU), dont l'activité est spécialement autorisée par la loi et réglementée par les pouvoirs publics. Il en va, cependant, autrement en cas de méconnaissance, par ces établissements, des dispositions relatives à l'enregistrement des paris et au règlement des enjeux. Tel en est le cas lorsqu'il a été contrevenu aux dispositions de l'article 15 de l'arrêté du 13 septembre 1985 portant règlement du pari mutuel urbain, du fait que des paris ont été reçus sans que les enjeux correspondants, aient été encaissés préalablement alors qu'ils ne pouvaient être réglés qu'en espèces et au comptant ou par débit d'un compte ouvert auprès du PMU. Il résulte de ce qui pr&écède que la fin de non-recevoir tirée de l'exception de jeu était dans ce cas applicable. (1ère Chambre civile 13 mars 2019, pourvoi n°18-13856, BICC n°906 du 15 juillet 2019 et Legifrance).

Le Code de procédure civile distingue :

  • les exceptions d'incompétence; (art. 75 à 99),
  • les exceptions de litispendance et de connexité (art. 100 à 107).,
  • les exceptions dilatoires (art.108 à 111).,
  • les exceptions de nullité (art. 112 à 121),

    Il résulte de la combinaison des articles 73 et 74 du code de procédure civile que l'exception de procédure fondée sur les dispositions de l'article 4 du code de procédure pénale tendant au sursis à statuer dans l'attente de l'issue d'une procédure pénale, doit, à peine d'irrecevabilité, être soulevée avant toute défense au fond. Ces dispositions sont applicables quelle que soit la partie qui soulève l'exception de sursis à statuer. (2è Chambre civile 27 septembre 2012, pourvoi, n°11-16361, BICC n°774 du 15 janvier 2013 et Legifrance)

    Il est aussi jugé, que si les exceptions de nullité doivent, à peine d'irrecevabilité, être soulevées avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir, il en est ainsi alors même que les règles invoquées au soutien de l'exception seraient d'ordre public et alors même que la partie à laquelle elle est opposée n'invoquerait pas sa tardiveté (2e Chambre civile 16 mars 2017, pourvoi n°15-18805, BICC n°868 du 1er octobre 2017 et Legifrance). Consulter la note de M. Didier Krajeski, Ann. des loyers, mai 2007, p.67.

    En séparant d'une part les nullités encourues pour vice de forme et les nullités des actes pour irrégularité de fonds. La contestation de la compétence internationale du juge français saisi constitue une exception de procédure, en application de l'article 74, alinéa 1, du code de procédure civile, elle est irrecevable lorsqu'elle été soulevée pour la première fois devant la Cour d'appel alors que l'appelant avait conclu sur le fond en première instance. (1re Civ. - 23 mai 2012, pourvoi n°10-26188, BICC n°770 et Legifrance). Les exceptions de procédure fondées sur l'inobservation des règles de fond relatives aux actes de procédure ne doivent être relevées d'office que lorsqu'elles ont un caractère d'ordre public (chambre commerciale 14 décembre 2010, pourvoi n°09-71712, BICC n°740 du 15 avril 2011 et Legifrance).

    La nullité invoquée devant une Cour d'appel tendait à contester le caractère exécutoire de décisions de justice sur le fondement desquelles une procédure de saisie immobilière avait été pratiquée. La Cour de cassation a infirmé cet arrêt, jugeant que le moyen constituait non une exception de procédure mais une défense au fond susceptible d'être proposée en tout état de cause. (2e Chambre civile 5 septembre 2019, pourvoi n°17-28471, BICC n°915 du 1er février 2020 et Legifrance).

    La Loi constitutionnelle 2008-724 du 23 juillet 2008 complétée par la Loi organique du 10 décembre 2009 a institué l'exception d'inconstitutionnalité qui peut être soulevées devant toutes les juridictions civiles. Afin d'éviter que le moyen ne soit qu'un procédé dilatoire, les exceptions de nullité pour vice de forme doivent être soulevées "in limine litis" c'est à dire avant toute défense au fond. Ainsi, lorsque le procès a été introduit par une personne sans qualités, lorsque la créance ou l'action est prescrite, lorsque le demandeur ne justifie d'aucun intérêt à agir, ou encore lorsque l'instance a été engagée hors des délais légaux, il s'agit alors d'une "fin de non-recevoir". La "fin de non-recevoir" se distingue de l'exception de nullité en ce qu'elle suit le régime des exceptions de fond et que si les exceptions de procédure doivent être soulevées "in limine litis", en revanche, les fins de non recevoir peuvent être invoquées en tout état de cause (Cour de cassation -3e Chambre civile 21 juin 2006 - n°de pourvoi : 05-13028 et 2e Chambre civile 24 janvier 2008 (les deux arrêt sont publiés sur le site de Legifrance). La Cour de cassation rappelle que constitue une exception de procédure tout moyen qui tend soit à faire déclarer la procédure irrégulière ou éteinte, soit à en suspendre le cours. Dès lors, le moyen pris par le défendeur de la nullité de l'acte juridique sur lequel se fonde le demandeur constitue non pas une exception de procédure mais une défense au fond qui peut être proposée en tout état de cause (3e chambre civile 16 mars 2010, pourvoi n°09-13187, BICC n°726 du 15 juillet 2010 et Legifrance).

    Sur le cas de l'exception d'irrégularité tenant au fait qu'un des magistrats de la Chambre d'une Cour d'appel avait jugé l'affaire comme juge des référés, voir le mot "Cour d'appel".

    Voir aussi :

  • Pièces (dossier),
  • Contradictoire,
  • Preuve.

    Textes

  • Code de procédure civile, articles 73 et s., 95 et s, 100 et s., 771.1038.
  • Loi constitutionnelle n°2008 du 23 juillet 2008 de modernisation des institutions de la Ve République.
  • Loi organique n°2009-1523 du 10 décembre 2009 relative à l'application de l'article 61-1 de la Constitution.
  • Décret n° 2017-891 du 6 mai 2017 relatif aux exceptions d'incompétence.
  • Décret n° 2017-1227 du 2 août 2017 modifiant les modalités d'entrée en vigueur du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017 relatif aux exceptions d'incompétence et à l'appel en matière civile.
  • Bibliographie

  • Blanc, Les exceptions d'incompétence au cas où l'exception est soulevée par les parties, Gaz. Pal. 1976, 2, Doct. 463.
  • Commission de méthodologie de la Cour de cassation : L'effet dévolutif de l'appel et l'évocation, BICC n°620 du 1er juin 2005.
  • Gautier (P-Y), Observations sous 1ère Civ., 13 février 2007, Bull. 2007, I, n°57, RTC, juillet-septembre 2007, n°3, p. 585-587. (Exception de nullité - Recevabilité - Condition)
  • Guinchard (S.), Droit et pratique de la procédure civile : intérêt à agir, compétence, actes de procédure, aide juridique, procès équitable, référé, mise en état, incidents de procédure, jugement, voies de recours, frais de justice, Collection : Dalloz action, Paris, Dalloz, 1999,
  • Giverdon, La procédure de règlement des exceptions d'incompétence, Dalloz 1973, Chr. 155.
  • Malecki (C.), L'exception d'inexécution, Paris, LGDJ, 1999.
  • Meunier, Les exceptions d'incompétence après le décret du 20 juillet 1972, Dalloz 1974, Chr. 213.
  • Paris (F.), Le Juge et la clause d'exception, Paris, édité par l'auteur, 1998.
  • Perrot (R.), Le juge de l'action est juge de l'exception. Revue Procédures, n°4, avril 2012, commentaire n°105, p. 13, note à propos de Soc. ‑ 8 février 2012.

  • Liste de toutes les définitions